histoire

Je m’appelle Rory. On me demande parfois de qu’on c’est le diminutif, ou bien s’il s’agit d’un surnom, mais Rory, c’est bel et bien mon prénom usuel, ni plus, ni moins. Vous voulez une preuve ? Voilà ce qui est écrit sur mon certificat de naissance : Rory Fareeha Langley, fille d’Amira Saab et Gabriel Langley, née le 8 mai 2002 à San Jose en Californie. Donc voilà, maintenant vous pouvez être certains que c’est Rory et juste Rory.

J’utilise à peine mon second prénom, Fareeha. Celui-ci est d’origine arabe; on me l’a donné afin de reconnaitre la culture de ma mère. Voyez-vous, ma maman est originaire du Liban, mais avec ses parents, elle a quitté son pays natal à un jeune âge. À cause de la guerre civile, ils jugeaient qu’il était plus sécuritaire d’immigrer aux États-Unis. Mon père, lui, a une histoire bien plus banale : plus jeune d’une fratrie de 4 enfants, il a grandi sur une ferme du Kentucky.

Mes parents se sont rencontrés en 1995, alors qu’ils étaient tous deux étudiants au California Institute of Technology. Mon père étudiait en astronomie et biologie et ma mère en ingénierie mécanique. Contrairement aux clichés, ce ne fut pas le coup de foudre immédiat entre eux dès leur première rencontre. Par contre, l’évènement les ayant poussés à entrer en contact, lui, fut cliché : mon père se promenait dans les couloirs, une boîte débordante de matériel entre les mains. Lui et ma mère sont entrés en collision en tournant le coin d’un couloir. La pile d’objets hétéroclites lui bloquait la vue, il n’avait donc pas remarqué sa présence avant que ça ne soit trop tard pour esquiver. Il échappé tout son matériel et lui a fait renverser sa tasse de thé, ruinant les plans qu’elle avait dessinés pour son projet de fin de session. Autant dire que la première impression que ma mère eut de lui ne fut pas des plus positives. Bizarre, maladroit, tête en l’air. « Comme s’il venait d’un autre univers. » furent les mots qu’elle employa en me racontant l’histoire de leur rencontre. Mais mon père se sentait coupable d’avoir ruiné les plans de ma mère, il a donc insisté pour l’aider à les refaire.

Pourtant, alors qu’ils travaillaient ensembles, ma mère s’est rendu compte qu’il n’était pas si débile que ça, et que malgré son caractère particulier, il était quelqu’un de très intelligent et cultivé. Bref, ils sont devenus amis, puis c’est allé plus loin. Je vais vous épargner les détails gnangnan, sinon j’ai peur de rendre mon déjeuner. Ils se sont mariés à la fin de leurs études et ont déménagé à San Jose lorsque mon père a décroché un emploi entant que chercheur pour la NASA, au Ames Ressearch Center.

Puis quelques années plus tard, je suis née. Les premières années de ma vie ont été particulièrement inintéressantes. J’étais une gamine normale, si on ne compte pas le fait qu’on me désignait comme « intellectuellement précoce ». J’ai toujours eu une bonne relation avec mes parents, en particulier avec mon père, parce qu’on partage la même passion pour l’espace. Depuis que je suis toute jeune, il lui arrive de m’amener à son travail, c’est notre activité père-fille, aussi étrange que ça puisse vous sembler.

Mon frère Jason est né en 2008, quand j’avais six ans. Au départ, je faisais la gueule, comme toute grande sœur qui se respecte, car l’arrivée d’un nouveau bébé signifiant moins d’attention pour moi de la part de mes parents. Pourtant, j’ai fini par l’accepter, Jason, et je suis devenue très protectrice envers lui.

En 2010, la relation de nos parents a commencé à moins bien aller, mais encore aujourd’hui, je n’arrive pas à déceler pourquoi. Je suppose que la flamme s’était simplement éteinte… À 2 ans, Jason était encore trop jeune pour comprendre, mais moi, du haut de mes 8 ans, j’ai pu voir leur séparation arriver de loin. Le divorce s’est finalisé en début 2012. C’est notre mère qui a obtenu la garde complète et notre père ne s’est pas opposé. Maman, Jason et moi, nous sommes déménagés à New York, là où ma mère avait grandi, car elle voulait être plus proche de ses parents.

Le nouvel appartement à Brooklyn était sympa, mais notre maison en banlieue de San Jose, que papa avait gardé à l’issue du divorce, me manquait. En milieu urbain, il était impossible de regarder les étoiles dans le ciel, à cause de toutes les lumières. J’ai mis un peu de temps à m’habituer à ce nouvel environnement.

C’est jamais cool de déménager en milieu d’année scolaire, d’arriver dans une nouvelle classe où tout le monde se connait déjà depuis un moment. La petite Rory, âgée de 10 ans, était terrorisée. Je pensais que je serais ostracisée, mais lors de mon premier jour dans cette nouvelle école, j’ai rencontré Dinesh. Il s’est assis à côté de moi à l’heure du repas et m’a fait remarquer qu’on avait la même boîte à lunch Pikachu. C’est comme ça que notre amitié a commencé, parce qu’on était tous deux amateurs de Pokémon. On est tout de suite devenus inséparables : lui et moi, on faisait tous ensembles. On s’est assurés d’être inscrits au même collège, puis au même lycée, et on est encore meilleurs amis aujourd’hui.

Ma mère n’a pas mis beaucoup de temps avant de recommencer à faire de nouvelles rencontres. Quelques mois seulement après le déménagement, elle nous a présenté sa nouvelle copine, Victoria. C’était beaucoup trop vite pour moi : elle et papa venaient tout juste de se séparer, et elle était déjà avec quelqu’un d’autre ? Jamais ! Jason et moi, on n’aimait pas Vic, ni la relation qu’elle entretenait avec notre mère. Ne vous inquiétez pas, ce n’est pas parce qu’elle est une femme : on n’a rien contre les gays. C’est juste que comme j’ai déjà mentionné, c’était trop soudain : maman voulait déjà remplacer papa.

Avec le temps, Jason a accepté Victoria comme un membre de la famille, mais je ne peux pas affirmer que j’en ai fait autant. Sa présence me laisse encore un goût amer, même si j’essaie de bien m’entendre avec elle, pour faire plaisir à ma mère.

Mon père, je ne vois seulement l’espace de deux ou trois semaines pendant les vacances d’été. Je passe une semaine avec lui à San Jose et j’en profite pour prendre des nouvelles des amis que j’ai encore là-bas, puis après on part en road trip jusqu’au Kentucky pour aller voir mes grands-parents paternels, ainsi que mes oncles et ma tante qui vivent encore là-bas et la panoplie de cousins. Jason, lui, préfère aller à la plage avec maman et Victoria – les parents de Vic ont une maison à Key West, en Floride. Je ne lui en veux pas, après tout, il reconnait à peine papa car il était encore trop jeune au divorce.

Les vacances d’il y a deux ans ont été les plus mémorables. C’est là qu’est survenue ma rencontre avec Kyanite, qui vint bouleverser ma vie. Je faisais un tour dans le labo de mon père lorsque deux conteneurs ont attiré mon attention. Dans chacun se trouvait substance à l’apparence gélatineuse, une rouge, l’autre bleue. J’ai interrogé mon père sur ce de quoi il s’agissait, mais il l’ignorait. Tout ce qu’il savait, c’était qu’on avait retrouvé ces choses au cœur d’une météorite. Il m’a cependant avertie de garder mes distances.

Mais vous savez, quand on me dit de ne pas faire quelque-chose, ça m’en donne dix fois plus envie. Je me suis approché du blob bleu et j’ai tapé la vitre du bout du doigt. Il a réagi en venant frapper la paroi au même endroit que moi. Je me suis écarté juste avant que mon père ne revienne dans la pièce avec un sachet de cookies. Il est reparti l’instant d’après, on avait besoin de lui ailleurs. J’étais donc assise sur l’un des comptoirs, mangeant mes cookies. J’ai tourné la tête une fraction de seconde et bim, plus de biscuit, comme s’il s’était volatilisé d’entre mes doigts. Le coupable était le blob bleu, je l’ai pris la main dans le sac. Littéralement, je l’ai trouvé dans le paquet de biscuits.

Je ne peux définir que d’étrange la sensation que j’ai ressentie lorsque nous nous sommes liés. Comme si je n’étais plus la seule à habiter ce corps, et c’était le cas. Cette chose faisait maintenant partie de moi. Je n’étais plus la même personne. Mon père a flippé lorsqu’il a vu que le symbiote n’était plus dans son tube. Je lui ai menti, prétendant que je n’avais rien vu. J’avais peur qu’ils commencent à expérimenter sur moi s’ils apprenaient ce qui venait d’arriver. Kyanite était effrayé lui aussi : il ne comprenait pas ce qui se passait, où lui et son frère, Carnelian, avaient atterris. Je voulais le protéger.

Donc voilà, j’ai ramené un souvenir particulier de ces vacances. Ky et moi avons appris à cohabiter. Sa présence m’a transformée : je suis plus forte, plus rapide, plus agile, mes sens sont plus développés et je guéris plus vite. C’était effrayant au départ, puis j’ai réalisé que je pouvais utiliser ces capacités à bon escient. J’ai commencé à me balader dans les rues en soirée pour combattre de crime. En même temps, ma délinquance a commencé, parce qu’en arpentant les rues, j’ai trouvés de beaux endroits ou faire des graffitis. Je me suis fait coincée à quelques reprises, mais je n’ai jamais eu de sanctions plus sévères que quelques heures de travail communautaire.

Mais le vandalisme n’est pas le seul crime que je commets : cela fait un moment déjà que je m’adonne au piratage informatique. Je suis curieuse, j’aime découvrir ce que les gens cachent…enfin, surtout le gouvernement. Je suis peut-être trop obsédée par toutes les conspiarcy theories qui courent ici et là.

Mener une double – ou même triple ? – vie, ce n’est pas facile. Je ne peux pas laisser mes proches découvrir ce que je fais dans mon temps libre, donc je les évite pour ne pas avoir à leur parler et risquer de dévoiler quoi que ce soit. Cela ne s’accentue que d’avantage depuis que les Accords de Sokovie ont été passés…

De jour, je suis Rory, une élève modèle, de nuit je suis une délinquante juvénile qui cache Kyanite, un justicier masqué. Et au milieu de tout ça, il y a un hacker sans nom qui s’infiltre dans les fichier des plus qu’humains recensés pour mettre la pagaille. ...Ouais, j'ai une vie compliquée.

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